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Quand Apollon a les boules


Alors Apollon, je l'ai eu pour moi, pendant des années, quand je travaillais dans le Stade Ch. Erhmann de Nice. Je pouvais lui rendre hommage tous les jours :

Un beau jour la Mairie de Nice a décidé qu'il n'était plus en disgrâce et donc l'a remis sur la place Masséna et dans période de Yule d'Apollon, il est devenu le Père Noël :

'ai eu envie de vous mettre un article qui a été écrit en 2012 par un journaliste sur Nice-Matin donc le voici :

Et si j'étais .... la statue du dieu grec de la danse sur la place Masséna ?

Fichtre. Encore une jolie muse qui se fait photographier à mes côtés. Une de plus devant laquelle je suis condamné à rester de marbre. Moi, l'Apollon de la place Masséna. Si beau, si courtisé, si.... frustré devant tant de jupes si courtes, des décolletés si plongeants !


Ah, c'était plus facile avant ! En 1956, la première fois que je me suis installé ici, les jupes étaient moins courtes, les décolletés moins provocants, ça n'a pas duré.


A cette époque, j'étais juste un bouche-trou ! Parce que la couverture du Paillon réalisée entre 1881 et 1884 avait créé un grand vide, un déséquilibre accentué par la construction du Casino municipal qui a déplacé le centre de gravité devant sa façade. Alors, avec mon pédiluve richement décoré, on m'a installé au milieu de Nord-Sud. J'étais beau .... comme un Apollon.


Sauf qu'apparemment, il a pas tout compris, le sculpteur : c'étaient des cheveux qu'on devait me mettre sur la tête. Pas des ... chevaux. Je crois que l'oreille d'Auguste Janniot, mon créateur, était aussi dure que le marbre blanc dans lequel il m'a taillé entre 1934 et 1937.

L'exil en 1979

Et puis j'ai fait mon temps. On a fini par m'exiler en 1979 ! Parce que l'entretien de mon pédiluve coûtait trop cher. Et parce que mes attributs choquaient !


Aujourd'hui, mes attributs, on s'en moque. Dans tous les sens du terme. Un Apollon si grand, si fort, avec de si grosses fesses, et un si petit .... organe. Quelle honte. Mais, moi, je suis un artiste ! Un chanteur. Mon bel organe est ailleurs, mesdames. Comme j'aimerais vous épater en déclamant quelques chants grecs....


Bref. Longtemps, je suis resté en exil à l'entrée du stade Charles Erhmann. Là-bas, c'était pas si mal : j'ai pu assister à des matches de foot. Et à plein de concerts. Le plus géant, c'était celui de U2, en juillet 2009 : "Beautiful daaaaaay!!!"


Et puis il y a eu cette sale journée en juin 2011. Mon transfert de nouveau vers la place Masséna..... une autre humiliation ! D'abord, on m'a fait passer pour un obèse en faisant croire à tout le monde qu'il fallait absolument deux grues pour me soulever. L'une de 100 tonnes, l'autre de 55.... alors que moi, je n'en pèse que 20 petites ! On m'a transporté sur un camion porte-char. Moi, l'homme de culture. On a tenté de me rassurer : "C'est parce que t'es canon" m'a-t-on dit. Tout ça pour quoi ? Retour au " statue quo"...


J'ai retrouvé mon pédiluve. Tout neuf. Avec quelques jets massants. Et depuis, je subis. Les flashs. Les provocations.


Le pire, c'est quand il y a quelques semaines, une ribambelle d'Espagnols est venue m'assaillir de toutes parts. Tout ça parce qu'il avait gagné ..... un euro ! Avec ça, t'es plus rien. Surtout à Nice.


D'ailleurs, nous les Grecs, on l'a pas perdu l'euro. Pas encore .... On est venu patauger dans mes pattes, on m'a marché sur les pieds. Certains me sont montés dessus. L'humiliation. Et, en plus, je n'ai pas échappé aux quolibets. Encore à cause de mes attributs : "Apollon ? Apollita, si !!!!" Les Espagnols comprendront. Sinon, à vos dicos, lettre "P". Le suffixe "ita" étant un diminutif. Et le rire derrière : "Jajajaja !"


Maintenant, je suis comme une vache en bord de chemin de fer, puisque je tourne le dos à Poséïdon, qui vient me glisser dans un embrun quelques souvenirs à l'oreille : " Tu te rappelles Laomédon ? Ce qu'on lui a mis ?" Je regarde le tram passer et repasser.


Du haut de mes sept mètres, je reste d'un calme olympien. Que les anges de la baie se tiennent à carreau. Moi, je suis un dieu. Et vous n'arriverez pas à me faire déchanter.


Texte : Yann Delanoe


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